Tales of Symphonia : Dawn of the New World - Test

Bob prit dans ses mains le noyau, qui avait la forme d’un crâne miniature, puis entonna une mélopée :
« Eveille-toi, ô Centurion du Sarcasme, du Tiramisu et du Verbe ! Eveille-toi, Aronaar !
- Tu m’as appelé et j’apparais, fit l’intéressé. Quel est le problème ?
- Tales of Symphonia 2.
- Ah oui, quand même. Bien, s’il le faut... »
La diffusion des Tales of est pour le moins chaotique. Un coup uniquement au japon, un coup sur plusieurs consoles, un coup uniquement sur Wii au japon et sur PS3 pour le monde entier...
Après le succès de Tales of Symphonia ayant servi d’ambassadeur de la série pour le reste du monde, Namco a apparemment décidé qu’une suite serait de bon augure (il y avait eu, avant cela, un seul précédent tout à fait marginal). Et d’en faire profiter tout le monde.
Pour rester sobre, ami Lecteur : ce n’était pas une bonne idée.

Le courage est la magie qui transforme les rêves en réalité
Si vous avez besoin de vous rafraîchir la mémoire quant à l’épisode précédent, je vous invite cordialement à lire mon test à ce propos.
Le début laissait présager du bon, avec le génial doubleur anglais de Kratos nous narrant très schématiquement l’histoire à propos de l’Arbre de Mana et les deux mondes séparés ayant été réunis.
Dawn of the New World (on comprend que le titre ait été changé par rapport à l’original : « Knight of Ratatosk ») commence deux ans après la fin du Périple de la Régénération, les choses ne sont pas roses. Pour une raison inconnue, des bouleversements climatiques gangrènent le monde (désert enneigé, tempêtes etc.) et en plus de cela, l’agitation est vive entre habitants de Tesséha’lla et ceux de Sylvarant, même en se retrouvant sur la même planète, les premiers considèrent les seconds comme inférieurs face à leur technologie et civilisation.
Le Vanguard s’est formé à la suite de cet état de fait, voulant défendre les sylvaranti et s’opposer à l’Eglise de Martel qui soutient les tesséhalliens.
Et, horreur, stupéfaction, l’introduction nous laisse voir Lloyd, apparemment appuyé par l’Eglise, détruire Palmacosta, tuant les parents du protagoniste principal, Emil Castagnier, qui a eu le temps de venir au secours d’une jeune fille appelée Marta. Oui, après Colette, les développeurs ont apparemment une appétence pour les prénoms français démodés.
Bref, avance rapide six mois plus tard, où l’on retrouve Emil chez ses oncle et tante à Luin, où l’on constate rapidement que c’est le bouc-émissaire honni de tout le patelin, à tel point qu’un villageois s’étonne mollement qu’il soit encore vivant.
Personne ne l’aime, si cet état de fait change par le pouvoir du Script, vous aurez probablement envie de le mépriser vous aussi, on y reviendra.
Précisons quand même de suite qu’Emil est l’archétype du anti-héros, faible de volonté, timide, peureux, renfermé, peu propice à l’action et manquant de confiance en soi, ne cherchant jamais le conflit. Hey, on dirait moi quand j’étais plus jeune ! Ce pour quoi ce n’est PAS une bonne idée pour un protagoniste ! Ahem.
Quoi qu’il en soit, il croise Richter et... Non, je dois encore m’interrompre. L’allure - mince, bien proportionné, cheveux roux, visage triangulaire - et le style, la personnalité, le rôle joué - cassant, factuel, dégageant une aura de pouvoir, peu porté sur les émotions, servant de mentor - font tellement de Richter un ersatz de Kratos (en bien moins intéressant) que c’en est douloureux.
Il donne du peps à Emil et ce mantra niaiseux à souhait en titre de cette partie, de fil en aiguille, il se joint à lui pour partir à la recherche de Marta (dont, lui, bizarrement, ne se souvient pas).
Problème, Richter semble vouloir tuer Marta pour récupérer le noyau de Ratatosk, le seigneur des monstres.
Emil devient donc un chevalier de Ratatosk pour protéger Marta, avec l’aide de Tenebrae, un Centurion de Ratatosk (sorte d’esprit régnant sur les monstres d’un certain type, il y en a huit en tout) ils finissent par échapper à Richter.
Lorsque Luin est attaquée par l’Eglise de Martel et qu’Emil, possédé par le pouvoir de Ratatosk, empêche un autre massacre, il ne lui reste plus qu’à se joindre à Marta et Tenebrae pour découvrir pourquoi Lloyd est si méchant, accessoirement arrêter les désastres climatiques. Car apparemment Ratatosk était l’esprit gardien de l’Arbre de mana et régulait le flux de l’énergie primordiale, tant que lui et les Centurions restent en sommeil, c’est un foutoir monstrueux sur la planète.
En soi on a une trame de « sauver le monde » classique, mais cela se transforme en quelque chose de relativement quelconque et souvent pénible.
Nous verrons cela tout à l’heure, Bob, section suivante.

Tales of redondance
DotNW ne dépaysera certes pas les vétérans du soft précédent, car il n’apporte que peu de changements sur le tableau. Nous sommes toujours dans un A-RPG bien dynamique, on tranche, on lance des sorts (appelés, avec les techniques spéciales, « artes ») ; on bloque les assauts ennemis, on court librement sur le terrain pour mieux savater ses ennemis...
Les combats en eux-mêmes ne varient pas trop, on retrouve les attaques unisson, les capacités remplacent celles données autrefois par les exsphères (là elles s’acquièrent juste en montant de niveau, demandant une portion de votre capital en points limités pour être activées), le mana régénérant à chaque coup porté et en petite partie à la fin du combat.
Des faiblesses élémentaires, la possibilité de coups critiques... On notera simplement la disparition de l’état d’adrénaline, qui rendait insensible et permettait à Sheena de faire ses invocations, ainsi que l’ajout des « arte mystiques » pour Emil et Marta, qui sont des attaques unissons buffées et plus faciles à exécuter.
Mais il y a tout de même une modification de poids influant sur les combats : Emil et Marta sont les seuls nouveaux personnages jouables ! Sans style particulièrement original. Emil fait office de Lloyd, Marta de Colette à qui on aurait filé des sorts de soin et de soutien.
L’équipe précédente viendra à tour de rôle se rendre disponible dans votre roster, sauf que leur équipement ne peut pas être changé (normal : vous ne pourrez en obtenir que pour Emil et Marta), leur niveau est fixe (il ne change que quand ils partent puis reviennent dans l’équipe, pour mieux coller aux besoins de la progression) et sauf erreur de ma part, ils n’ont pas de nouvelles techniques.
L’intérêt de les contrôler est donc faible puisqu’ils n’évolueront pas et qu’un joueur du premier ToS en connaîtra déjà les ficelles. Comment le jeu compense-t-il cela ? Puisque Ratatosk est le seigneur des monstres, avec un système à la Pokémon !
J’espère sincèrement que ce n’est pas cette particularité de gameplay qui a inspiré une histoire en accord, ce serait assez triste.
Non pas que ce soit foncièrement à jeter. Vous avez la possibilité de capturer un monstre si quatre indicateurs sur cinq sont du même élément qu’un indicateur central, les divers attaques spéciales et sorts modifiant les indicateurs mineurs ; par exemple, les sorts de soin font pencher les indicateurs vers l’élément eau.
Les monstres que vous capturez changeant de niveau et peuvent évoluer une fois un certain seuil atteint, en leur donnant à manger dans une guilde de minouz (oubliez ainsi les recettes pour régénérer l’équipe). Ils seront réinitialisés au niveau 1 avec une croissance plus efficace. Vous pouvez même les faire retourner ensuite à l’état initial pour tout recommencer et avoir des stats toujours plus hautes !
Néanmoins cela n’est pas forcément nécessaire, comme ils deviennent suffisamment fort ainsi
(les nourrir les renforce également). Vous pouvez capturer autant de montres que vous voulez, mais uniquement cinq peuvent gagner de l’expérience en même temps.
La chose étant : pourquoi se préoccuper sérieusement de faire de l’élevage ? Les monstres bénéficient aussi de capacités, comme anti-oiseau, mais ce n’est pas comme si vous alliez passer votre temps à changer de monstre pour telle ou telle situation.
C’est plaisant un moment de les voir évoluer, cependant, au bout du compte, il n’y a pas besoin d’en capturer des tonnes, ceux qu’on rencontre plus tard dans le jeu ne sont pas nécessairement tellement meilleurs, leur IA est loin d’être performante et, tout simplement- ce ne sont pas des personnages !
Pas de dialogue, pas de personnalité, pas d’interaction. Pas de possibilité de les contrôler non plus. Le jeu, en mode normal, étant moins exigeant que son aîné, on pourra préférer prendre les anciens personnages, même si les monstres finissent, quand on voit leur stat, par être plus efficaces.
Du moins, en théorie...
Playtime’s over... Ain Soph Aur !
Vu la qualité des personnages d’Emil et Marta qui sera discutée plus loin, c’est déjà un point, si pas noir, d’un gris bien foncé. C’est plus facile d’implanter ça que de nouveaux personnages ayant un lien avec l’histoire.
Un autre changement de taille est à déplorer : l’absence pure et simple de toute exploration de la carte. Celle-ci pouvait être parfois fastidieuse avec les montres très agressifs et la lenteur relative de déplacement tant qu’on n’avait pas trouvé la borne « longue distance » pour la zone concernée, enfin, arpenter l’environnement est un trait significatif dans beaucoup de RPG.
On pourrait argumenter avec raison que les deux mondes ont déjà été explorés auparavant, quel mal y a-t-il donc à pouvoir directement se rendre d’un lieu à l’autre ?
C’est en fait un mal directement lié à la volonté de créer une suite si proche dans le temps. On passe l’aventure à visiter les mêmes villes, le regard « neuf » d’Emil et Marta n’apporte pas grand-chose à l’affaire ; les localités n’ont pas si changé qu’on veuille ardemment les redécouvrir.
On se retrouve dans des donjons déjà connus, car, pour plus de commodité, les noyaux des Centurions en hibernation (nécessaires pour réveiller Ratatosk) se trouvent dans les divers temples où il a fallu conclure des pactes avec les Esprits originels.
Ces phases reflètent DofNW en entier : une version inférieure en tous points à son prédécesseur. On se voit forcé de faire en partie les mêmes puzzles, pour des donjons finalement moins longs, sans aviver une grosse dose de fun.
ToS était connu pour avoir régulièrement des phases pénibles, ToS2 retient plus ça que le reste. Rien du niveau de la forêt d’Ymir avec l’une des « énigmes » les plus téléphonées que je connaisse, mais enfin, bien laborieux avec du backtracking en pagaïe, comme les environnements sont déjà connus, l’habillage disparaît pour ne plus laisser que des obstacles possédant un trop fort goût de ralentisseur arbitraire.
Les quelques zones nouvelles, comme la forteresse du Cap, ne brillent pas particulièrement. Elles se noient dans le sentiment de remâché général, diminuant l’impression d’avoir vraiment « vaincu » le donjon, plutôt d’avoir rempli une tache administrative.
D’un côté, la structure de l’aventure rappelle celle du premier en plus épuré et moins inventif, d’un autre, elle est bourrée d’objectifs triviaux en comparaison du souffle épique d’autrefois.
Il y a une différence entre rechercher des ingrédients rares pour soigner Colette, à laquelle on peut facilement s’attacher et chercher du romarin (...) dans des grottes perdues car un PNJ de troisième zone souffre d’un empoisonnement spécifique.
Le tout car Regal a été enfermé pour incendies volontaires, le PNJ pourrait témoigner qu’il est innocent. Situation plus « logique » dans un monde sans papiers d’identité, de journaux, de radio, de télévision, téléphone- même avec la technologie pour communiquer via hologrammes.
Et de tuer le monstre responsable des incendies, ce qui nécessite encore un voyage à Triet pour pêcher des méduses (Triet est une oasis, rappelons-le) car c’est plus cohérent que de rester à Izoold, village de pêcheurs et donc absolument pas convenable pour pêcher des méduses.
Ce n’est pas pour dire que ToS n’avait pas ses moments où le bon sens était tacitement banni, mais ici cela apparaît de façon plus sensible.
C’est moins pire que de devoir sauver un gamin s’étant perdu dans les ruines de la ferme humaine d’Isélia, nécessitant un long puzzle idiot avec des plateformes (le mouflet devait avoir un téléporteur à usage unique), uniquement pour faire bonne impression à Raine et réintroduire son personnage dans l’histoire.
Si seulement ce n’était pas aussi voyant...
Un conte à la fraîcheur fanée
Dawn of the New World essaye maladroitement de compenser en proposant un élément inédit : des quêtes tertiaires aux différentes guildes des minouz. Ce qui aurait été sympathique, si cela n’avait pas juste consisté à hacher du monstre en deux saveurs : un combat unique ou une succession de 3-4 combats obligatoires, dans des mini-donjons réutilisés à outrance quel que soit le prétexte narratif (dont on finit par se moquer allégrement) pour une récompense, en plus des coffres contenant des ingrédients.
C’est affreusement répétitif et même un brin pathétique à force d’être dans les mêmes environnements, avec des justifications RP à la ramasse pour faire encore et encore la même chose.
Et vous savez quoi ? Les quêtes annexes sont loin d’être à la hauteur. Seule celle de Richter vaut réellement le détour puisqu’on en apprend plus à son sujet, ce qui vaut toujours mieux que de collectionner des masques inutiles... Ce qui exige de préparer le sentier pour la mauvaise fin !
Une autre quête annexe creuse le personnage d’Alice, membre sadique du Vanguard, mais ne consiste qu’en quelques scènes supplémentaires.
Rien à voir avec les trois pourfendeurs proposant un véritable challenge (et une véritable récompense !), tout autant que trouver Maxwell ou collecter les armes maudites pour battre Abyssion. D’accord, les armes maudites mettaient bien trop longtemps à devenir rentable, mais il y avait quand même le plaisir d’avoir battu un boss secret, plus fort que Mythos !
Pour les acharnés de défi, il y a bien un donjon optionnel, très dur, long, répétitif, avec des monstres puissants et des récompenses en rapport. Problème : il faut un new game+ pour le débloquer, il ne plaira pas à tout le monde.
Pendant que nous causons du new game+, il permet comme avant, contre des points glanés au combat, de customiser une nouvelle partie : expérience multipliée par 2 (ce qui a allégé les souffrances de votre serviteur), conserver les titres, l’argent, les recettes (le wonder chef est encore de la partie), le journal des monstres, etc.
Si vous finissez le jeu en maniac, il y a même une difficulté encore supérieure ! Du moins, avec la dose de torture déjà procurée par le jeu, je vois mal pourquoi on voudrait souffrir autant, mieux vaut encore refaire le premier épisode en difficulté maximale.
Dawn of the New World a-t-il tout faux ? Non, bien sûr. Il conserve une base saine qui a fait ses preuves, tout en s’appuyant trop dessus et offrant de nouveaux éléments guère convaincants.
La synthèse, pour terminer le tableau, est encore là, toutefois elle s’enrichit d’un trop grand nombre d’ingrédients et perd en praticité.
Avec les quêtes tertiaires ayant quand même le mérite (jusqu’à un certain point) d’octroyer « en avance » des équipements plus performants, elle devient relativement mineure. Au passage, l’argent non plus n’est pas un grand souci. Forcément, comme il n’y a que deux personnages à équiper...
Monster love story
Revenons maintenant sur le scénario, les personnages et l’atmosphère. Encore plus que les errances de gameplay, lesquelles n’empêchent pas le plaisir de jeu, c’est bien cet aspect qui assassine Dawn of the New World.
Vous vous rappelez Yugi et Yami Yugi ? Hé bien voilà, c’est exactement la même chose, avec un niveau similaire d’opposition caricaturale. Emil change progressivement, tout en restant le gentil.
Gentil dans le sens hélas malheureux utilisé dans nos sociétés, où cela sonne plus souvent comme un défaut (bonne poire naïf limite un peu crétin d’aider les autres) que comme une vertu.
Il reste très mièvre et continue de fuir le conflit... D’autant plus que lorsqu’il y a combat, il passe en mode Ratatosk, où il est obsédé par la protection de Marta, a les yeux rouges, une voix gonflée à la testostérone et se montre excessivement violent, se fichant par exemple du sort d’une innocente aspirée en même temps qu’un ennemi par une de ses attaques !
En plus de cela, Marta est follement amoureuse d’Emil car il l’a sauvé à Palmacosta, ce qui mène à des scènes vaudevillesques (10 points bonus Scrabble) entre eux deux pour une romance clairement trop envahissante par rapport au reste du récit. ToS avait choisi la voie raisonnable en ayant un fort lien entre Colette et Lloyd, sans que ça dégénère en scènes de ménage et mamours baveux.
Avec sa sensiblerie et son affection exagérée pour Emil, Marta devient donc pratiquement aussi pénible que lui, faisant du couple de très mauvais personnages principaux, d’ailleurs éclipsés par les anciens. La bonne écriture de ces derniers en sort renforcée (comme le caractère pragmatique et rationnel de Raine), au détriment de ceux censés porter l’histoire.
Certes, on apprécie de revoir les héros du précédent jeu, qu’ils fassent référence à leur aventure, sauf que cela développe un tel sentiment que Marta Emil font figure d’intrus. Cette impression d’altérité est renforcée par certaines de leurs réactions, comme Emil ne sachant pas qui est Sheena...
Alors qu’il a passé six mois à Luin, où se trouve une statue d’elle !
En plus de cela, il faut rajouter les temps de dialogues excessifs alloués à l’expression des sentiments de chacun (surtout Emil/Marta, bien entendu) et des réactions aux réactions d’autrui. J’ai rarement vu d’histoire où l’on s’appesantit autant sur le fait d’être désolé, s’excuser, se raccommoder, exprimer ses regrets.
Cela tourne régulièrement en rond, devient lassant et ne fait pas avancer l’histoire d’un pouce. Ironiquement, on en vient apprécier la brutalité d’Emil en mode Ratatosk, qui veut faire bouger les choses !
Les saynètes participent également à cela. Heureusement, il y a suffisamment d’humour pour en rendre beaucoup supportables, notamment avec Tenebrae, qui, comme Jade Curtiss dans Tales of the Abyss, adore créer des malentendus, lancer des traits d’esprits, des jeux de mot, se moquer des autres et rappeler ce qui est important avec son langage châtié.
Il est une bouffée d’air frais au milieu d’un cloaque récurrent d’apitoiement et de bons sentiments niais.
Cela dit, ça ne suffit pas à améliorer la qualité générale de l’intrigue, bien en deçà de celle antérieure. On sent très vite que quelque chose cloche avec Emil, le développement de l’histoire est relativement prévisible, méchants et gentils n’en finissent pas avec leurs chassé-croisé (ratant plein d’occasions d’en finir une fois pour toutes avec la force adverse...), trop de situations ne sont présentes que pour ralentir le développement d’un scénario guère épais, toute la problématique avec « Lloyd est-il un monstre sanguinaire ? » est illusoire, tout cela pour un final sans fanfare.
Sequilis mallum ?
Avec mon latin néologique de cuisine, j’aimerai traiter brièvement d’un mal dépassant DotNW : celui des suites.
Oui, nul besoin de se voiler la face, souvent cela surfe sur un succès initial pour continuer d’exploiter le filon à dollars. Et assez souvent, Damodar soit loué, pour le plaisir réciproque des joueurs et des développeurs.
Mais voilà, ToS 2 montre bien toute l’erreur, encore plus dans une série qui s’en abstenait, qu’il y a à vouloir absolument bâtir une continuation sur un support déjà achevé.
L’histoire de Tales of Symphonia n’avait pas besoin d’être complétée, elle se suffisait à elle-même. Les deux mondes étaient réunis, la vérité s’était faite jour, les racines du tourment ont été extirpées. Les héros ont rempli leur mission, le Cruxis a été démantelé, la production d’exsphères s’est arrêtée, la persécution des demi-elfes régresse, la planète a retrouvé un certain équilibre.
Je conçois fort bien qu’en créant une histoire - que ce soit en jeu vidéo, en roman ou film - on ne pense pas forcément à ce qui va arriver par la suite. Etant auteur amateur, c’est un problème auquel je suis sensible.
Pour autant, il faut savoir quand et si une suite est souhaitable, au-delà du simple appât du gain. Ici, on sent clairement que les Centurions et l’influence des monstres sur le mana ont été superposés sur les faits déjà établis. Il n’y a pas réellement d’accroche pour justifier ce nouveau moteur dramatique qui se crée soi-même.
L’erreur de Namco a été de vouloir trop faire appel au prestige du premier épisode, qui déborde partout dans celui-là :Emil et Marta sont minorés par rapport au reste des personnages.
La maladresse s’étend jusqu’à faire de Richter un clone dilué de Kratos…
En fait, la chose est simple : il ne fallait pas produire une suite directe. Il y avait tout loisir de laisser passer beaucoup plus de temps afin que la géopolitique des deux mondes réunifiés change considérablement, qu’il y ait de nouveaux lieux, de nouvelles villes, des changement significatifs apportés aux anciennes localisations.
L’action des héros de la Régénération reste telle qu’elle aura un écho pour les siècles à venir, on aurait pu facilement retrouver des personnages immortels (Kratos, Yuan, les Esprits) ou vivant longtemps (Raine et Génis) afin d’aider à forger un lien de continuité.
Le clash entre les tesséhaliens et les sylvaranti, finalement survolé par moments dans Dawn of the New World, offre une bonne base pour une nouvelle aventure, mettant en avant de nouveaux thèmes.
Car un autre problème de ToS 2, c’est qu’il abandonne les thèmes forts comme la discrimination ou l’égalité. Je ne suis pas naturellement porté sur les oeuvres à « message », mais ToS avait su le faire intelligemment et l’intégrer réellement à son propos, plutôt que de n’en être que le porte-parole creux.
En dernière analyse, il serait injuste de jeter l’anathème sur Dawn of the New World et le déclarer une erreur complète. Une suite indigne, par contre ?
Clairement. Il ne peut exister sans ToS, mais en existant comparé à lui (et comment éviter le parallèle ?), le jeu est une déception généralisée.
Souvent on retrouve des débats entre ceux se plaignant qu’une suite soit trop semblable au jeu précédent, ou au contraire qu’elle change trop la formule ; DotNW fait les deux et en pâtit doublement.
Dommage, donc. Avec plus de réflexion - et avec un tout autre scénario - on aurait pu avoir droit à un titre de qualité.

Dites bonjour à Richter, le pseudo-Kratos de ToS II, élucubrant cet horrible axiome.
Le courage est la magie qui transforme les rêves en réalité
Si vous avez besoin de vous rafraîchir la mémoire quant à l’épisode précédent, je vous invite cordialement à lire mon test à ce propos.
Le début laissait présager du bon, avec le génial doubleur anglais de Kratos nous narrant très schématiquement l’histoire à propos de l’Arbre de Mana et les deux mondes séparés ayant été réunis.
Dawn of the New World (on comprend que le titre ait été changé par rapport à l’original : « Knight of Ratatosk ») commence deux ans après la fin du Périple de la Régénération, les choses ne sont pas roses. Pour une raison inconnue, des bouleversements climatiques gangrènent le monde (désert enneigé, tempêtes etc.) et en plus de cela, l’agitation est vive entre habitants de Tesséha’lla et ceux de Sylvarant, même en se retrouvant sur la même planète, les premiers considèrent les seconds comme inférieurs face à leur technologie et civilisation.
Le Vanguard s’est formé à la suite de cet état de fait, voulant défendre les sylvaranti et s’opposer à l’Eglise de Martel qui soutient les tesséhalliens.
Et, horreur, stupéfaction, l’introduction nous laisse voir Lloyd, apparemment appuyé par l’Eglise, détruire Palmacosta, tuant les parents du protagoniste principal, Emil Castagnier, qui a eu le temps de venir au secours d’une jeune fille appelée Marta. Oui, après Colette, les développeurs ont apparemment une appétence pour les prénoms français démodés.
Bref, avance rapide six mois plus tard, où l’on retrouve Emil chez ses oncle et tante à Luin, où l’on constate rapidement que c’est le bouc-émissaire honni de tout le patelin, à tel point qu’un villageois s’étonne mollement qu’il soit encore vivant.
Personne ne l’aime, si cet état de fait change par le pouvoir du Script, vous aurez probablement envie de le mépriser vous aussi, on y reviendra.
Précisons quand même de suite qu’Emil est l’archétype du anti-héros, faible de volonté, timide, peureux, renfermé, peu propice à l’action et manquant de confiance en soi, ne cherchant jamais le conflit. Hey, on dirait moi quand j’étais plus jeune ! Ce pour quoi ce n’est PAS une bonne idée pour un protagoniste ! Ahem.
Quoi qu’il en soit, il croise Richter et... Non, je dois encore m’interrompre. L’allure - mince, bien proportionné, cheveux roux, visage triangulaire - et le style, la personnalité, le rôle joué - cassant, factuel, dégageant une aura de pouvoir, peu porté sur les émotions, servant de mentor - font tellement de Richter un ersatz de Kratos (en bien moins intéressant) que c’en est douloureux.
Il donne du peps à Emil et ce mantra niaiseux à souhait en titre de cette partie, de fil en aiguille, il se joint à lui pour partir à la recherche de Marta (dont, lui, bizarrement, ne se souvient pas).
Problème, Richter semble vouloir tuer Marta pour récupérer le noyau de Ratatosk, le seigneur des monstres.
Emil devient donc un chevalier de Ratatosk pour protéger Marta, avec l’aide de Tenebrae, un Centurion de Ratatosk (sorte d’esprit régnant sur les monstres d’un certain type, il y en a huit en tout) ils finissent par échapper à Richter.
Lorsque Luin est attaquée par l’Eglise de Martel et qu’Emil, possédé par le pouvoir de Ratatosk, empêche un autre massacre, il ne lui reste plus qu’à se joindre à Marta et Tenebrae pour découvrir pourquoi Lloyd est si méchant, accessoirement arrêter les désastres climatiques. Car apparemment Ratatosk était l’esprit gardien de l’Arbre de mana et régulait le flux de l’énergie primordiale, tant que lui et les Centurions restent en sommeil, c’est un foutoir monstrueux sur la planète.
En soi on a une trame de « sauver le monde » classique, mais cela se transforme en quelque chose de relativement quelconque et souvent pénible.
Nous verrons cela tout à l’heure, Bob, section suivante.

En tant que chevalier du seigneur des monstres, la capture de ces derniers sera naturellement à l’honneur.
Tales of redondance
DotNW ne dépaysera certes pas les vétérans du soft précédent, car il n’apporte que peu de changements sur le tableau. Nous sommes toujours dans un A-RPG bien dynamique, on tranche, on lance des sorts (appelés, avec les techniques spéciales, « artes ») ; on bloque les assauts ennemis, on court librement sur le terrain pour mieux savater ses ennemis...
Les combats en eux-mêmes ne varient pas trop, on retrouve les attaques unisson, les capacités remplacent celles données autrefois par les exsphères (là elles s’acquièrent juste en montant de niveau, demandant une portion de votre capital en points limités pour être activées), le mana régénérant à chaque coup porté et en petite partie à la fin du combat.
Des faiblesses élémentaires, la possibilité de coups critiques... On notera simplement la disparition de l’état d’adrénaline, qui rendait insensible et permettait à Sheena de faire ses invocations, ainsi que l’ajout des « arte mystiques » pour Emil et Marta, qui sont des attaques unissons buffées et plus faciles à exécuter.
Mais il y a tout de même une modification de poids influant sur les combats : Emil et Marta sont les seuls nouveaux personnages jouables ! Sans style particulièrement original. Emil fait office de Lloyd, Marta de Colette à qui on aurait filé des sorts de soin et de soutien.
L’équipe précédente viendra à tour de rôle se rendre disponible dans votre roster, sauf que leur équipement ne peut pas être changé (normal : vous ne pourrez en obtenir que pour Emil et Marta), leur niveau est fixe (il ne change que quand ils partent puis reviennent dans l’équipe, pour mieux coller aux besoins de la progression) et sauf erreur de ma part, ils n’ont pas de nouvelles techniques.
L’intérêt de les contrôler est donc faible puisqu’ils n’évolueront pas et qu’un joueur du premier ToS en connaîtra déjà les ficelles. Comment le jeu compense-t-il cela ? Puisque Ratatosk est le seigneur des monstres, avec un système à la Pokémon !
J’espère sincèrement que ce n’est pas cette particularité de gameplay qui a inspiré une histoire en accord, ce serait assez triste.
Non pas que ce soit foncièrement à jeter. Vous avez la possibilité de capturer un monstre si quatre indicateurs sur cinq sont du même élément qu’un indicateur central, les divers attaques spéciales et sorts modifiant les indicateurs mineurs ; par exemple, les sorts de soin font pencher les indicateurs vers l’élément eau.
Les monstres que vous capturez changeant de niveau et peuvent évoluer une fois un certain seuil atteint, en leur donnant à manger dans une guilde de minouz (oubliez ainsi les recettes pour régénérer l’équipe). Ils seront réinitialisés au niveau 1 avec une croissance plus efficace. Vous pouvez même les faire retourner ensuite à l’état initial pour tout recommencer et avoir des stats toujours plus hautes !
Néanmoins cela n’est pas forcément nécessaire, comme ils deviennent suffisamment fort ainsi
(les nourrir les renforce également). Vous pouvez capturer autant de montres que vous voulez, mais uniquement cinq peuvent gagner de l’expérience en même temps.
La chose étant : pourquoi se préoccuper sérieusement de faire de l’élevage ? Les monstres bénéficient aussi de capacités, comme anti-oiseau, mais ce n’est pas comme si vous alliez passer votre temps à changer de monstre pour telle ou telle situation.
C’est plaisant un moment de les voir évoluer, cependant, au bout du compte, il n’y a pas besoin d’en capturer des tonnes, ceux qu’on rencontre plus tard dans le jeu ne sont pas nécessairement tellement meilleurs, leur IA est loin d’être performante et, tout simplement- ce ne sont pas des personnages !
Pas de dialogue, pas de personnalité, pas d’interaction. Pas de possibilité de les contrôler non plus. Le jeu, en mode normal, étant moins exigeant que son aîné, on pourra préférer prendre les anciens personnages, même si les monstres finissent, quand on voit leur stat, par être plus efficaces.
Du moins, en théorie...

Les Artes permettront au moins de se défouler.
Playtime’s over... Ain Soph Aur !
Vu la qualité des personnages d’Emil et Marta qui sera discutée plus loin, c’est déjà un point, si pas noir, d’un gris bien foncé. C’est plus facile d’implanter ça que de nouveaux personnages ayant un lien avec l’histoire.
Un autre changement de taille est à déplorer : l’absence pure et simple de toute exploration de la carte. Celle-ci pouvait être parfois fastidieuse avec les montres très agressifs et la lenteur relative de déplacement tant qu’on n’avait pas trouvé la borne « longue distance » pour la zone concernée, enfin, arpenter l’environnement est un trait significatif dans beaucoup de RPG.
On pourrait argumenter avec raison que les deux mondes ont déjà été explorés auparavant, quel mal y a-t-il donc à pouvoir directement se rendre d’un lieu à l’autre ?
C’est en fait un mal directement lié à la volonté de créer une suite si proche dans le temps. On passe l’aventure à visiter les mêmes villes, le regard « neuf » d’Emil et Marta n’apporte pas grand-chose à l’affaire ; les localités n’ont pas si changé qu’on veuille ardemment les redécouvrir.
On se retrouve dans des donjons déjà connus, car, pour plus de commodité, les noyaux des Centurions en hibernation (nécessaires pour réveiller Ratatosk) se trouvent dans les divers temples où il a fallu conclure des pactes avec les Esprits originels.
Ces phases reflètent DofNW en entier : une version inférieure en tous points à son prédécesseur. On se voit forcé de faire en partie les mêmes puzzles, pour des donjons finalement moins longs, sans aviver une grosse dose de fun.
ToS était connu pour avoir régulièrement des phases pénibles, ToS2 retient plus ça que le reste. Rien du niveau de la forêt d’Ymir avec l’une des « énigmes » les plus téléphonées que je connaisse, mais enfin, bien laborieux avec du backtracking en pagaïe, comme les environnements sont déjà connus, l’habillage disparaît pour ne plus laisser que des obstacles possédant un trop fort goût de ralentisseur arbitraire.
Les quelques zones nouvelles, comme la forteresse du Cap, ne brillent pas particulièrement. Elles se noient dans le sentiment de remâché général, diminuant l’impression d’avoir vraiment « vaincu » le donjon, plutôt d’avoir rempli une tache administrative.
D’un côté, la structure de l’aventure rappelle celle du premier en plus épuré et moins inventif, d’un autre, elle est bourrée d’objectifs triviaux en comparaison du souffle épique d’autrefois.
Il y a une différence entre rechercher des ingrédients rares pour soigner Colette, à laquelle on peut facilement s’attacher et chercher du romarin (...) dans des grottes perdues car un PNJ de troisième zone souffre d’un empoisonnement spécifique.
Le tout car Regal a été enfermé pour incendies volontaires, le PNJ pourrait témoigner qu’il est innocent. Situation plus « logique » dans un monde sans papiers d’identité, de journaux, de radio, de télévision, téléphone- même avec la technologie pour communiquer via hologrammes.
Et de tuer le monstre responsable des incendies, ce qui nécessite encore un voyage à Triet pour pêcher des méduses (Triet est une oasis, rappelons-le) car c’est plus cohérent que de rester à Izoold, village de pêcheurs et donc absolument pas convenable pour pêcher des méduses.
Ce n’est pas pour dire que ToS n’avait pas ses moments où le bon sens était tacitement banni, mais ici cela apparaît de façon plus sensible.
C’est moins pire que de devoir sauver un gamin s’étant perdu dans les ruines de la ferme humaine d’Isélia, nécessitant un long puzzle idiot avec des plateformes (le mouflet devait avoir un téléporteur à usage unique), uniquement pour faire bonne impression à Raine et réintroduire son personnage dans l’histoire.
Si seulement ce n’était pas aussi voyant...

Les combats restent au moins dynamiques.
Un conte à la fraîcheur fanée
Dawn of the New World essaye maladroitement de compenser en proposant un élément inédit : des quêtes tertiaires aux différentes guildes des minouz. Ce qui aurait été sympathique, si cela n’avait pas juste consisté à hacher du monstre en deux saveurs : un combat unique ou une succession de 3-4 combats obligatoires, dans des mini-donjons réutilisés à outrance quel que soit le prétexte narratif (dont on finit par se moquer allégrement) pour une récompense, en plus des coffres contenant des ingrédients.
C’est affreusement répétitif et même un brin pathétique à force d’être dans les mêmes environnements, avec des justifications RP à la ramasse pour faire encore et encore la même chose.
Et vous savez quoi ? Les quêtes annexes sont loin d’être à la hauteur. Seule celle de Richter vaut réellement le détour puisqu’on en apprend plus à son sujet, ce qui vaut toujours mieux que de collectionner des masques inutiles... Ce qui exige de préparer le sentier pour la mauvaise fin !
Une autre quête annexe creuse le personnage d’Alice, membre sadique du Vanguard, mais ne consiste qu’en quelques scènes supplémentaires.
Rien à voir avec les trois pourfendeurs proposant un véritable challenge (et une véritable récompense !), tout autant que trouver Maxwell ou collecter les armes maudites pour battre Abyssion. D’accord, les armes maudites mettaient bien trop longtemps à devenir rentable, mais il y avait quand même le plaisir d’avoir battu un boss secret, plus fort que Mythos !
Pour les acharnés de défi, il y a bien un donjon optionnel, très dur, long, répétitif, avec des monstres puissants et des récompenses en rapport. Problème : il faut un new game+ pour le débloquer, il ne plaira pas à tout le monde.
Pendant que nous causons du new game+, il permet comme avant, contre des points glanés au combat, de customiser une nouvelle partie : expérience multipliée par 2 (ce qui a allégé les souffrances de votre serviteur), conserver les titres, l’argent, les recettes (le wonder chef est encore de la partie), le journal des monstres, etc.
Si vous finissez le jeu en maniac, il y a même une difficulté encore supérieure ! Du moins, avec la dose de torture déjà procurée par le jeu, je vois mal pourquoi on voudrait souffrir autant, mieux vaut encore refaire le premier épisode en difficulté maximale.
Dawn of the New World a-t-il tout faux ? Non, bien sûr. Il conserve une base saine qui a fait ses preuves, tout en s’appuyant trop dessus et offrant de nouveaux éléments guère convaincants.
La synthèse, pour terminer le tableau, est encore là, toutefois elle s’enrichit d’un trop grand nombre d’ingrédients et perd en praticité.
Avec les quêtes tertiaires ayant quand même le mérite (jusqu’à un certain point) d’octroyer « en avance » des équipements plus performants, elle devient relativement mineure. Au passage, l’argent non plus n’est pas un grand souci. Forcément, comme il n’y a que deux personnages à équiper...

Au moins, les saynètes sont doublées (et Tenebrae remonte le niveau global).
Monster love story
Revenons maintenant sur le scénario, les personnages et l’atmosphère. Encore plus que les errances de gameplay, lesquelles n’empêchent pas le plaisir de jeu, c’est bien cet aspect qui assassine Dawn of the New World.
Vous vous rappelez Yugi et Yami Yugi ? Hé bien voilà, c’est exactement la même chose, avec un niveau similaire d’opposition caricaturale. Emil change progressivement, tout en restant le gentil.
Gentil dans le sens hélas malheureux utilisé dans nos sociétés, où cela sonne plus souvent comme un défaut (bonne poire naïf limite un peu crétin d’aider les autres) que comme une vertu.
Il reste très mièvre et continue de fuir le conflit... D’autant plus que lorsqu’il y a combat, il passe en mode Ratatosk, où il est obsédé par la protection de Marta, a les yeux rouges, une voix gonflée à la testostérone et se montre excessivement violent, se fichant par exemple du sort d’une innocente aspirée en même temps qu’un ennemi par une de ses attaques !
En plus de cela, Marta est follement amoureuse d’Emil car il l’a sauvé à Palmacosta, ce qui mène à des scènes vaudevillesques (10 points bonus Scrabble) entre eux deux pour une romance clairement trop envahissante par rapport au reste du récit. ToS avait choisi la voie raisonnable en ayant un fort lien entre Colette et Lloyd, sans que ça dégénère en scènes de ménage et mamours baveux.
Avec sa sensiblerie et son affection exagérée pour Emil, Marta devient donc pratiquement aussi pénible que lui, faisant du couple de très mauvais personnages principaux, d’ailleurs éclipsés par les anciens. La bonne écriture de ces derniers en sort renforcée (comme le caractère pragmatique et rationnel de Raine), au détriment de ceux censés porter l’histoire.
Certes, on apprécie de revoir les héros du précédent jeu, qu’ils fassent référence à leur aventure, sauf que cela développe un tel sentiment que Marta Emil font figure d’intrus. Cette impression d’altérité est renforcée par certaines de leurs réactions, comme Emil ne sachant pas qui est Sheena...
Alors qu’il a passé six mois à Luin, où se trouve une statue d’elle !
En plus de cela, il faut rajouter les temps de dialogues excessifs alloués à l’expression des sentiments de chacun (surtout Emil/Marta, bien entendu) et des réactions aux réactions d’autrui. J’ai rarement vu d’histoire où l’on s’appesantit autant sur le fait d’être désolé, s’excuser, se raccommoder, exprimer ses regrets.
Cela tourne régulièrement en rond, devient lassant et ne fait pas avancer l’histoire d’un pouce. Ironiquement, on en vient apprécier la brutalité d’Emil en mode Ratatosk, qui veut faire bouger les choses !
Les saynètes participent également à cela. Heureusement, il y a suffisamment d’humour pour en rendre beaucoup supportables, notamment avec Tenebrae, qui, comme Jade Curtiss dans Tales of the Abyss, adore créer des malentendus, lancer des traits d’esprits, des jeux de mot, se moquer des autres et rappeler ce qui est important avec son langage châtié.
Il est une bouffée d’air frais au milieu d’un cloaque récurrent d’apitoiement et de bons sentiments niais.
Cela dit, ça ne suffit pas à améliorer la qualité générale de l’intrigue, bien en deçà de celle antérieure. On sent très vite que quelque chose cloche avec Emil, le développement de l’histoire est relativement prévisible, méchants et gentils n’en finissent pas avec leurs chassé-croisé (ratant plein d’occasions d’en finir une fois pour toutes avec la force adverse...), trop de situations ne sont présentes que pour ralentir le développement d’un scénario guère épais, toute la problématique avec « Lloyd est-il un monstre sanguinaire ? » est illusoire, tout cela pour un final sans fanfare.

La raison étant : recyclage d’environnements à fonds !
Sequilis mallum ?
Avec mon latin néologique de cuisine, j’aimerai traiter brièvement d’un mal dépassant DotNW : celui des suites.
Oui, nul besoin de se voiler la face, souvent cela surfe sur un succès initial pour continuer d’exploiter le filon à dollars. Et assez souvent, Damodar soit loué, pour le plaisir réciproque des joueurs et des développeurs.
Mais voilà, ToS 2 montre bien toute l’erreur, encore plus dans une série qui s’en abstenait, qu’il y a à vouloir absolument bâtir une continuation sur un support déjà achevé.
L’histoire de Tales of Symphonia n’avait pas besoin d’être complétée, elle se suffisait à elle-même. Les deux mondes étaient réunis, la vérité s’était faite jour, les racines du tourment ont été extirpées. Les héros ont rempli leur mission, le Cruxis a été démantelé, la production d’exsphères s’est arrêtée, la persécution des demi-elfes régresse, la planète a retrouvé un certain équilibre.
Je conçois fort bien qu’en créant une histoire - que ce soit en jeu vidéo, en roman ou film - on ne pense pas forcément à ce qui va arriver par la suite. Etant auteur amateur, c’est un problème auquel je suis sensible.
Pour autant, il faut savoir quand et si une suite est souhaitable, au-delà du simple appât du gain. Ici, on sent clairement que les Centurions et l’influence des monstres sur le mana ont été superposés sur les faits déjà établis. Il n’y a pas réellement d’accroche pour justifier ce nouveau moteur dramatique qui se crée soi-même.
L’erreur de Namco a été de vouloir trop faire appel au prestige du premier épisode, qui déborde partout dans celui-là :Emil et Marta sont minorés par rapport au reste des personnages.
La maladresse s’étend jusqu’à faire de Richter un clone dilué de Kratos…
En fait, la chose est simple : il ne fallait pas produire une suite directe. Il y avait tout loisir de laisser passer beaucoup plus de temps afin que la géopolitique des deux mondes réunifiés change considérablement, qu’il y ait de nouveaux lieux, de nouvelles villes, des changement significatifs apportés aux anciennes localisations.
L’action des héros de la Régénération reste telle qu’elle aura un écho pour les siècles à venir, on aurait pu facilement retrouver des personnages immortels (Kratos, Yuan, les Esprits) ou vivant longtemps (Raine et Génis) afin d’aider à forger un lien de continuité.
Le clash entre les tesséhaliens et les sylvaranti, finalement survolé par moments dans Dawn of the New World, offre une bonne base pour une nouvelle aventure, mettant en avant de nouveaux thèmes.
Car un autre problème de ToS 2, c’est qu’il abandonne les thèmes forts comme la discrimination ou l’égalité. Je ne suis pas naturellement porté sur les oeuvres à « message », mais ToS avait su le faire intelligemment et l’intégrer réellement à son propos, plutôt que de n’en être que le porte-parole creux.
En dernière analyse, il serait injuste de jeter l’anathème sur Dawn of the New World et le déclarer une erreur complète. Une suite indigne, par contre ?
Clairement. Il ne peut exister sans ToS, mais en existant comparé à lui (et comment éviter le parallèle ?), le jeu est une déception généralisée.
Souvent on retrouve des débats entre ceux se plaignant qu’une suite soit trop semblable au jeu précédent, ou au contraire qu’elle change trop la formule ; DotNW fait les deux et en pâtit doublement.
Dommage, donc. Avec plus de réflexion - et avec un tout autre scénario - on aurait pu avoir droit à un titre de qualité.
Conclusion
1220
Tales of Symphonia premier du nom jouit d’un prestige mérité. La barre a été mise trop haute, cette suite se casse les dents à presque tous les étages…
Je pense que ce test aura su vous montrer pourquoi on peut le considérer ainsi !
Pas grand-chose à rajouter, si ce n’est qu’a posteriori, à l’instar de mon ami avec qui j’ai terminé la première fois le jeu, je pense qu’Emil et compagnie méritent complètement la mauvaise fin disponible...
Venez, Bob. Allons tuer des orcs et oublions cette triste épopée.
Bons points - Saynètes doublées - Bande-son excellente (car reprenant majoritairement celle du jeu précédent…) - Système de combat qui marche tout aussi bien - Tenebrae - La mauvaise fin (pour prendre sa revanche sur Emil/Ratatosk) - Le concept de capture de monstres |
Mauvais points - Bye bye l’exploration de la carte - Couple de protagonistes peu charismatique - Nouvelle crise du mana téléphonée - Quêtes tertiaires d’une répétitivité monstrueuse - Recyclage à fond des environnements avec un prétexte narratif bien commode - Histoire prévisible - Uniquement deux nouveaux personnages jouables - Moindre niveau de défi - Se flingue tout seul en se mettant dans l’ombre de son prédécesseur - Richter, le pseudo-Kratos - Rempli de temps morts sur l’état d’esprit des personnages et de moments mièvres |
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Certes, ça avait commencé assez fort en présentant Lloyd comme un monstre assoiffé de sang mais ça ne suffisait pas à faire tenir en haleine le joueur sur tout le jeu.
J'ai également aussi le vague souvenir des personnages de TOS1 qu'on récupère mais avec un système assez particulier vu qu'ils ne gagnaient, toujours de mémoire, plus d'XP. Seuls Emil et Marta avaient un fonctionnement "normal".
Reprendre le même monde, retraverser les mêmes endroits, ça donne une sensation de déjà-vu qui se transforme assez vite en lassitude (un peu comme TOTK quand on a fait BOTW tiens).
On a juste un bref moment, en dehors de l'intro où entend la voix de Kratos. Par contre, ce n'est pas une si bonne idée de "juste" le mettre là pour ça car ça ne fait que souligner son absence, sans rien apporter d'équivalent comme personnage complexe.
J'ai cru comprendre que ce jeu n'avait pas été développé par l'équipe de TOS1... et ça se voit. C'est l'exemple typique d'une suite qui aurait pu être bien plus intéressante si on avait demandé aux scénaristes de l'œuvre originale de s'y coller.
Après TOS, je conseillerai bien plus Tales of Phantasia qui se déroule avant l'histoire de Lloyd (et de Mithos).